La physique quantique suggère-t-elle de nouvelles « interprétations » du monde ?

Par Michel Bitbol, philosophe des sciences, directeur de recherche émérite CNRS aux
Archives Husserl de l’École normale supérieure, et Franck Laloë, physicien, directeur de
recherche émérite CNRS au Laboratoire Kastler Brossel de l’École normale supérieure.
Animée par Céline Boisserie-Lacroix, philosophe et commissaire de l’exposition
Sensation quantique.

Rencontre
La physique quantique occupe une place à part au sein de la physique. Ses succès
explicatifs et prédictifs sont innombrables et sans équivalent. Pourtant, le formalisme
de la mécanique quantique et, plus précisément, la relation qu’entretient ce formalisme
avec le réel qu’il décrit, ne cesse de faire couler l’encre des physiciennes et physiciens
comme des philosophes, et ce, depuis l’avènement de la discipline, il y a bientôt cent ans.
Un des axiomes de la physique classique est qu’il est toujours possible de distinguer le
système considéré des moyens mobilisés pour son étude — typiquement une expérience
qui aboutit à une mesure. Il n’en va plus de soi lorsqu’il s’agit du monde quantique. Dans
ce cas, en effet, une expérience n’est plus réputée simplement révéler une propriété
préexistante du système considéré. De façon encore plus radicale, c'est l’attribution
même de propriétés propres à un système qui pose question. Dès lors le formalisme,
aussi efficace soit-il, se garde bien de lever l’ambiguïté sur ces questions. Le débat a
donc pris place depuis longtemps sur ce qui est désormais dénommé l’« interprétation »
de la physique quantique.
Cette nocturne propose une discussion sur les interprétations possibles de la physique
quantique.




Crédit photo miniature : ©Benoît RAJAU / CNRS Images