Battmann Fantaisie brillante pour mariage et baptême sur des thèmes de Rossini

Extraite de l'opus 353, cette fantaisie brillante et joyeuse de Jacques-Louis Battmann (1818-1886) (et non Batman !) est construite sur des motifs de Rossini. Toutes les vues proviennent de l'église Notre-Dame (près de la place Chavanelle) à Saint-Étienne. Aux claviers, Jean-Luc Perrot. Accord de l'orgue : Franck Bistocchi.


On lit parfois que les organistes du XIXe siècle jouaient de temps à autres des airs d’opéra à l’église. Ô scandale ! Pourtant, au XVIIe et au XVIIIe siècle, les ouvertures à la françaises, les différents récits (au dessus, en taille, à la basse) directement inspirés des scènes théâtrales ne choquent pourtant généralement pas grand monde. S’il est facile de trouver des transcriptions de musiques de Lully, il est en revanche plus difficile de trouver des partitions pour orgue du XIXe siècle s’inspirant des airs d’opéra. On cherchera vainement de telles pages chez Lefébure-Wély, pourtant si décrié (ne pas confondre les œuvres pour orgue de Lefébure avec celles pour harmonium), on citera éventuellement le Padre Davide de Bergamo… Aussi, c’est avec le plus grand intérêt qu’un ami m’a fait découvrir l’opus 353 de Jacques-Louis Battmann, composées de grandes pièces brillantes et développées (pour inauguration d’orgues, pour la fête patronale, pour la visite pastorale, pour la fête de Pâques, etc…).
Une autre pièce du même volume est enregistrée sur :
   • Battmann organiste à Belfort et Vesoul Off...  

Il est bien certain qu’il s’agit ici de musique joyeuse et débonnaire, qui ferait fuir les chauve-souris (Battmann, l'homme des chauve-souris !!!). Quand on écoute certains cantiques accompagnés à la guitare, on se dit qu’on peut bien se permettre, parfois, de telles incursions sur l’instrument à tuyaux !

Comment ne pas rapprocher cette œuvre d’un extrait de "La Duchesse de Langeais" (1855) d’Honoré de Balzac ?
https://fr.wikisource.org/wiki/La_Duc...

« La sœur qui touchait l’orgue excita un si vif enthousiasme qu’aucun des militaires ne regretta d’être venu à l’office. Les soldats même y trouvèrent du plaisir, et tous les officiers furent dans le ravissement. Quant au général, il resta calme et froid en apparence. Les sensations que lui causèrent les différents morceaux exécutés par la religieuse sont du petit nombre de choses dont l’expression est interdite à la parole, et la rend impuissante, mais qui, semblables à la mort, à Dieu, à l’Éternité, ne peuvent s’apprécier que dans le léger point de contact qu’elles ont avec les hommes. Par un singulier hasard, la musique des orgues paraissait appartenir à l’école de Rossini, le compositeur qui a transporté le plus de passion humaine dans l’art musical, et dont les œuvres inspireront quelque jour, par leur nombre et leur étendue, un respect homérique. Parmi les partitions dues à ce beau génie, la religieuse semblait avoir plus particulièrement étudié celle du Mosè, sans doute parce que le sentiment de la musique sacrée s’y trouve exprimé au plus haut degré. Peut-être ces deux esprits, l’un si glorieusement européen, l’autre inconnu, s’étaient-ils rencontrés dans l’intuition d’une même poésie. Cette opinion était celle de deux officiers, vrais dilettanti, qui regrettaient sans doute en Espagne le théâtre Favart. Enfin, au Te Deum, il fut impossible de ne pas reconnaître une âme française dans le caractère que prit soudain la musique. Le triomphe du Roi Très-Chrétien excitait évidemment la joie la plus vive au fond du cœur de cette religieuse. Certes elle était Française. Bientôt le sentiment de la patrie éclata, jaillit comme une gerbe de lumière dans une réplique des orgues où la sœur introduisit des motifs qui respirèrent toute la délicatesse du goût parisien, et auxquels se mêlèrent vaguement les pensées de nos plus beaux airs nationaux. Des mains espagnoles n’eussent pas mis, à ce gracieux hommage fait aux armes victorieuses, la chaleur qui acheva de déceler l’origine de la musicienne. »


Remerciements à M. Georges Lartigau.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques...