Le Train bleu

Y a des dorures qui brillent sous les soupirs du temps
Des lustres qui vacillent, comme au bal des élégants
Les murs ont des fresques pleines de voyages
Et l’on dîne en costume, juste avant le passage

C’est Le Train Bleu, le palace des quais
On y croise des adieux dans un verre de Tokay
Des dames en plumes fines, des hommes au regard droit
Chapeau melon calé, veston trois-pièces de soie

Y a des serveurs discrets qui glissent entre les tables
Un menu comme un roman, au parfum de mirage
Le Paris-Lyon-Méditerranée va partir
Et l’on sent dans l’air chaud quelque chose à finir

C’est Le Train Bleu, théâtre d’un instant
On y joue les départs avec l’art des galants
On y boit le silence, on y fume le destin
Avant que le sifflet ne coupe le matin

Regarde-la, la dame en fourrure ivoire
Elle attend qui ? On ne sait pas… peut-être l’espoir
Et ce monsieur-là, au cigare discret
Il part vers Marseille ou il fuit un regret ?

C’est Le Train Bleu, mémoire en velours
Un wagon sans moteur, mais chargé de beaux jours
Les lustres s’éteignent… le train s’éloigne enfin
Et dans l’assiette vide… il reste un peu de destin

Le sifflet…
Un frisson…
Et Le Train Bleu s’efface,
Comme un rêve…
Sous les pas des saisons