Producteurs et Parasites. Michel Feher

Dans son ouvrage le plus récent, Producteurs et parasites : L'imaginaire si désirable du Rassemblement national (2024), Michel Feher, philosophe et fondateur de la maison d'édition Zone Books, propose une analyse approfondie de l'attrait exercé par le discours du Rassemblement national (RN) sur une partie de l'électorat français. Il y explore la dichotomie entre les "producteurs", perçus comme des individus contribuant activement à la prospérité nationale par leur travail, leurs investissements et leurs impôts, et les "parasites", considérés comme des acteurs réfractaires à la "valeur travail" et accusés d'accaparer indûment les richesses créées par autrui. Cette catégorisation englobe à la fois les spéculateurs impliqués dans la circulation transnationale du capital et les bénéficiaires supposés illégitimes de la redistribution des revenus.
Feher retrace l'histoire de cette opposition entre producteurs et parasites, soulignant que, bien que cette critique des privilèges et des rentes ne soit pas l'apanage de l'extrême droite, elle a souvent conduit à une racialisation des catégories jugées parasitaires. Il met en évidence comment le RN utilise cette rhétorique pour diviser la société en classes moralement opposées, renforçant ainsi un imaginaire qui séduit de nombreux électeurs.
Cette analyse s'inscrit dans la continuité des réflexions entamées dans son précédent ouvrage, Le temps des investis : Essai sur la nouvelle question sociale (2017), où Feher examinait l'emprise croissante de la finance sur les entreprises, les gouvernements et les individus. Il y décrivait comment cette domination financière avait redéfini les rapports de pouvoir, déplaçant la question sociale vers des enjeux d'accréditation et de valorisation du capital humain